Les affrontements entre manifestants et forces de l’ordre ont fait 37 morts selon Human Right Watch pour la deuxième journée consécutive à Kinshasa, où le Rassemblement réclame toujours le départ du président Joseph Kabila et la tenue de l’élection présidentielle.
La capitale de la République démocratique du Congo a connue une fois de plus des morts dans la deuxième journée des manifestations contre le pouvoir.
Très tôt le matin, des sièges des partis de l’opposition ont été brûlé, faisant plusieurs victimes calcinées sous les décombres. Au siège de l’Union pour la Démocratie et le Progrès Social (UDPS), quatre corps ont été identifiés, deux carbonisés et deux autres personnes brûlées vives et un homme grièvement blessé. Dans l’enceinte du bâtiment, rapporte l’AFP, des bidons d’essence renversés témoignaient du caractère criminel de l’incendie. Le parti d’Etienne Tshisekedi a accusé la Garde Présidentielle d’en être la responsable.
De son côté, le gouvernement dément toute implication et dit condamner la violence « d’où quelle vienne et la vengeance à titre privé« . Le porte-parole Lambert Mendé a rappelé qu’une enquête était ouverte pour déterminer la responsabilité de chacun dans les actes de violences.
Durant la journée, une multitude d’affrontements entre forces de l’ordre et jeunes en colère a eu lieu dans les quartiers du centre et du sud de la capitale. Les communes de Limete, de Lemba, de Matete et celle de N’djili en furent l’épicentre. Comme la veille, plusieurs symboles de l’État, comme des postes de police, ont été attaqués. Il y a eu aussi plusieurs pillages.
Dans la commune de N’djili, des manifestants ont brûlé le Tribunal de Grande Instance, alors qu’au camp Luka, près du centre-ville, ils se sont emparés des véhicules de la de la police et des équipements anti-émeutes.
A l’Université de Kinshasa, d’intenses affrontements ont eu lieu entre des étudiants, épaulés par des jeunes habitants dans les quartiers avoisinant contre les forces de l’ordre. Plusieurs édifices publics, ainsi que deux stations service et une banque ont été pillé par des étudiants et la Police, ont rapporté des sources concordantes.
A Matete, un peu plus au Sud, un témoigne: « les bureaux de police ont été saccagés et les armes pillées, il y a eu des échanges de tirs. Des policiers ont été vu sur le pont Matete quittant leurs uniformes pour prendre la fuite. C’est la débandade! » Selon ce témoin, cité par l’AFP, des chars auraient été déployés dans le district de la Tshangu à l’Est de la capitale et les Buna Mura (ndlr: « esprits de mort » en Lingala, une unité militaire crainte à Kinshasa) seraient descendus dans la rues.
Ces violences, les pires depuis janvier 2015, ont commencé lundi matin en marge d’une manifestation à l’appel d’un « Rassemblement » d’opposition constitué autour d’Etienne Tshisekedi à trois mois et un jour de la fin du mandat de M. Kabila, pour lui signifier son « préavis ».
La marche a très rapidement dégénéré en affrontements avec les forces de l’ordre. L’opposition et le pouvoir se sont renvoyé la responsabilité des violences émaillées de pillages qui ont fait 50 morts selon le Rassemblement, 17 (3 policiers et 14 « pillards ») selon les autorités.
Dans un message sur Twitter, Ida Sawyer, chercheuse de l’ONG Human Rights Watch (HRW) récemment expulsée de la RDC, écrit que son organisation a reçu « des rapports crédibles de 37 civils tués par (les) forces de sécurité » depuis lundi (dont 17 pour la seule journée de mardi) et de 6 policiers et un membre du parti présidentiel « tués par les manifestants ».
Dans l’ensemble, la population de la capitale est restée massivement chez elle. Comme la veille la plupart des boutiques sont restées closes, et les écoles ont été désertées.
Pendant ce temps, le Dialogue politique qui s’est ouvert depuis le 1er septembre et qui devait prendre fin depuis le 17 septembre dernier peine à se clôturer. La Conférence épiscopale nationale du Congo (Cenco) a annoncé qu’elle suspendait sa participation « par respect pour les victimes », « pour faire le deuil et rechercher un consensus plus large ». Compliquant un peu plus la situation.
Dans la foulée, Edem Kodjo, le Facillitateur de l’Union africaine (UA) a annoncé que les travaux de ce forum étaient suspendus jusqu’à vendredi.
Dans la soirée, le président français François Hollande a qualifié d’ »inadmissibles » et « insupportables » les violences à Kinshasa et a accusé « l’Etat congolais lui-même » d’avoir provoqué « des exactions ».
Les Etats-Unis disent être prêts à prendre des sanctions financières contre d’autres responsables congolais après celles qu’ils avaient imposées en juin au chef de la police.
A 18h, un calme précaire regnait à Kinshasa.
Source AFP, RFI, & Paternaires.