Lors de son passage à Bonn pour la Cop23, Alpha Condé le président guinéen et actuel président en exercice de l’Union Africaine s’est exprimé à propos d’un éventuel troisième mandat. Pour lui, la question ne se pose pas encore, il s’agit d’un faux débat.
DW : Vous avez redit récemment que les pays africains doivent eux-mêmes trouvé leur chemin vers le progrès et la démocratie. Est-ce que vous êtes convaincu de ce que vous voyez en ce moment ?
Alpha Condé : L’Afrique a fait beaucoup de progrès. J’ai dit souvent que la plupart des problèmes auxquels nous sommes confrontés en Afrique sont dû à des ingérences étrangères et que donc il faut qu’on laisse désormais… Montesquieu disait « Vérité en deçà des Pyrénées, mensonge de l’autre côté ». Donc on doit permettre à chaque peuple d’appliquer les règles universelles de la démocratie que nous connaissons tous à sa situation concrète. Aujourd’hui, l’Afrique est confrontée à la migration, au terrorisme, au changement climatique. Donc il est important que l’Afrique prenne son destin en main comme l’Europe prend son destin en main. Il est normal que les positions africaines soient réglées dans le cadre de l’Union africaine. Bien sûr avec la participation et l’accompagnement de nos partenaires.
DW : Vous avez la chance d’écrire histoire : vous étiez le premier président guinéen, élu démocratiquement. Est-ce que vous serez aussi le premier président guinéen qui se retire du pouvoir comme le prévoit la constitution ?
Alpha Condé : Pour moi, pour le moment, j’ai un programme pour le peuple guinéen. Je me suis engagé à des choses. Pour le moment ce qui m’intéresse c’est l’application de mon programme. Je laisse les gens divaguer. Comment je vais respecter les engagements que j’ai pris, pour le peuple guinéen notamment, pour l’amélioration des vies des femmes et des jeunes.
DW : Souvent les présidents africains à la fin [de leurs deux mandats] disent : je n’ai pas encore tout fait ce que j’aurais pu faire, c’est pour cela que j’ai besoin d’un troisième mandat. Et vous : troisième mandat ou pas ?
Alpha Condé : je crois que le débat est un faux problème. Il y a des présidents qui gèrent bien et qui ont bien géré leur pays. C’est lorsqu’un président ne gère pas bien son pays… qui amène son pays dans la catastrophe… là, c’est normal que les gens veuillent le changement. Mais pour le moment ce débat n’est pas d’actualité pour moi.
DW : Excusez-moi de dire ça comme ça, mais vous aurez 80 ans l’année prochaine. Est-ce que vous pensez que quelqu’un qui a 80 ans représente encore bien une population qui pour trois quarts a moins de 30 ans ?
Alpha Condé : Le problème n’est pas l’âge mais c’est de savoir : qu’est-ce qu’on fait pour cette jeunesse ? On peut avoir 30 ans et ne rien faire pour cette jeunesse. Comme on peut avoir 90 ans et travailler pour cette jeunesse. Donc je pense que c’est un faux débat.
Source : DW Made for minds.