Emmanuel Macron a adressé sa lettre aux Français dimanche soir pour tenter de sortir de la crise des Gilets jaunes. Il y trace le chemin du grand débat tout en assurant qu’il n’y a pas de « questions interdites ».
Après près de deux mois de mobilisation des Gilets jaunes, qui a rassemblé pour le neuvième acte, samedi 12 janvier, 84 000 manifestants en France, Emmanuel Macron s’adresse une nouvelle fois aux Français, dimanche soir.
Dans une lettre rendue publique dans la soirée, le Président appelle tous les Français à prendre part au débat : une trentaine de questions pour encadrer le grand débat et « transformer les colères en solutions ». Les thèmes des questions avaient été définis le 10 décembre : fiscalité, modèle social, démocratie, institutions, transition écologique et diversité, immigration, laïcité. Le président promet qu’il « tirera toutes les conclusions » de cette consultation inédite, qui sera lancée mardi.
Il a déclaré que les propositions des Français « permettront de bâtir un nouveau contrat pour la Nation, de structurer l’action du Gouvernement et du Parlement, mais aussi les positions de la France au niveau européen et international ».
Pas de rétablissement de l’ISF
Le chef de l’État a assuré qu’il n’y aura « pas de questions interdites ». Pourtant, il trace plusieurs lignes rouges, en excluant de revenir sur les réformes votées sur la fiscalité sur le patrimoine. En clair, sur la suppression de l’ISF, dont le rétablissement fait pourtant partie des demandes les plus fréquentes apparues dans les cahiers de doléances ouverts dans des milliers de mairies.
Autre point non négociable pour Emmanuel Macron, la remise en cause du droit d’asile. Il n’évoque pas d’autres points que le gouvernement ne veut pas mettre sur la table, comme la peine de mort ou l’IVG. >>
En revanche, au milieu de questions attendues, comme celle sur la possibilité de compter les votes blancs ou d’une dose de proportionnelle, Emmanuel Macron pose la question de fixer des quotas annuels d’immigration, une mesure qu’il n’a jamais proposée.
Dans le mois qui suivra la fin du grand débat, le 15 mars, il donne rendez-vous aux Français pour sa traduction politique. Il ne précise pas comment les propositions des citoyens pourraient devenir réalité, s’abstenant d’évoquer l’idée de référendums multiples, suggérés par des membres du gouvernement.
Ce débat n’est « ni une élection, ni un référendum », avertit le chef de l’État. Car il représente pour l’exécutif autant un espoir qu’un risque politique, s’il débouche sur des demandes à l’opposé du programme présidentiel ou s’il fait un flop de participation. Ce qui torpillerait la solution politique choisie par le président, déjà très bas dans les sondages.
La consultation suscite la méfiance des Gilets jaunes
Sur Twitter, l’ensemble de la classe politique s’est empressé de commenter cette lettre. « On ne convoque pas tous les Français à 1 débat en leur interdisant de parler par ex de l’ISF », a déclaré Olivier Faure, Premier secrétaire du PS.
Pour Benoît Hamon, le chef de file de Générations, cette lettre « déçoit car elle est faible, prévisible, sans souffle ni vision. »
Nicolas Dupont-Aignan, président de Debout la France, a réagi sur Twitter. Pour lui, le président « ne cherche qu’à gagner du temps. »
La liste de questions posées par le chef de l’État avait également été contestée par l’opposition. « Des questions souvent fermées, orientées, des sujets fondamentaux absents, rien sur l’UE ! », a protesté Florian Philippot.
La consultation suscite aussi la méfiance des Gilets jaunes. Samedi à Strasbourg, un manifestant jugeait que « le débat, c’est dans la rue, pas dans une salle ou sur internet ». Dimanche, un « congrès fondateur » de quelque 600 Gilets jaunes des Pyrénées-Orientales pour structurer le mouvement et l’inscrire dans le débat s’est soldé par un échec.
Avec AFP