Pris entre deux feux, le président Trump a choisi de satisfaire l’aile la plus à droite de son parti en décidant d’abroger le programme DACA. Celui-ci permettait à 800 000 jeunes venus avec leurs parents illégalement, alors qu’ils étaient enfants, de pouvoir rester aux Etats-Unis sans craindre d’être expulsés. L’argument de son initiateur, Barack Obama : « Nous ne pouvons punir les enfants pour les erreurs de leurs parents ».
Donald Trump s’est tenu à distance de l’annonce, indique notre correspondant à Washington, Jean-Louis Pourtet,laissant son ministre de la Justice en donner la justification juridique : Obama, a-t-il dit en substance, en agissant par décret, n’a pas respecté la Constitution. Il a ignoré le Congrès qui a adopté dans le passé une loi sur l’immigration interdisant un programme tel que DACA. Nous devons donc respecter les directives de la branche législative, a expliqué Jeff Sessions. Trump, tout en annulant DACA, renvoie la balle dans le camp des élus qui ont six mois pour trouver une solution.
Exprimant de la sympathie pour les « Dreamers » le président s’est dit confiant : « J’ai de l’affection pour ces gens et j’espère que le Congrès pourra les aider de façon appropriée et je peux vous dire qu’en parlant aux élus, ils veulent faire quelque chose et ils veulent le faire bien. »
Si le Congrès n’arrive pas à s’entendre sur le sort de ces jeunes, ils retourneront dans l’ombre une fois leur permis de séjour expiré. La plupart sont décidés à rester. Ils bénéficient du soutien d’une majorité d’Américains indignés qui partagent l’opinion de Barack Obama. Qualifiant l’abrogation de DACA de cruelle, il a ajouté : « Il s’agit de savoir qui nous sommes et qui nous souhaitons être ».
La crainte de l’expulsion
Près de 800 000 de ces « Dreamers » vivent donc désormais dans la crainte d’une expulsion vers leur pays d’origine. La majorité d’entre eux sont des étudiants souvent brillants. C’est le cas d’Ivan, un mexicain de 22 ans diplomé de Berkeley en Californie et arrivé aux Etats-Unis à l’âge de 10 ans. L’annonce de Donald Trump a douché les rêves d’Amérique d’Ivan, explique notre correspondant en Californie, David Thomson. Parfaitement intégré, il est aujourd’hui diplômé de Berkeley, une des plus prestigieuses universités américaines.
La mine sombre, la décision de Donald Trump risque de faire de lui un clandestin : « Je suis très en colère. Tous les arguments utilisés pour abroger le DACA sont faux : comme de dire que les immigrants sont ici pour voler les emplois ou pour violer la loi. Moi je suis le seul de tout mon lycée à avoir intégré Berkeley ! »
Choisi sous Obama, rejetté sous Trump, Ivan, si son statut est révoqué, craint l’expulsion vers le Mexique, un pays qu’il ne connaît plus. « Ce pays (les Etats-Unis, ndlr) est tout ce que nous connaissons. Je ne sais plus quel est mon pays. Sur mon certificat de naissance j’ai un pays, je suis un ressortissant mexicain. Pourtant mes souvenirs sont ici, mes racines sont ici. Mais ce pays me rejette ». Le « Dreamer » mexicain diplomé de Berkeley garde un mince espoir : que le Congrès américain décide de rejeter dans six mois la demande de la Maison Blanche.
Rfi